Jody Horcholle

De nombreuses personnes s’étonnent du mouvement des « gilets jaunes » de bonne foi ou par manque d’information de leur part. Ce mouvement agrège de nombreuses revendications, pouvant les rendre parfois quelque peu inaudibles. Ce mécontentement possède plusieurs origines : La perception pour de nombreux français de voir leur pouvoir d’achat diminuer par l’augmentation du prix des carburants et les efforts demandés aux français dans le cadre de la transition écologiques (l’interdiction du diesel dans les années futures).  ll faut également ajouter la mesure du 80 km/h rejetée par 76 % des français. D’autres soutiennent ce mouvement pour protester contre les suppressions de poste dans l’Education Nationale, l’augmentation de la CSG, la remise en cause du statut des fonctionnaires, les hôpitaux de plus en plus difficulté…

Le déclencheur et le point commun de la grogne des gilets jaunes se trouvent dans l’augmentation des prix des carburants.

Certains opposants des gilets jaunes tentent de démontrer que ce mouvement n’est pas fondé. Ils expliquent que le coût de l’essence est moins élevé comparé au prix payé en 1970.

Les personnes supportant l’augmentation des prix des carburants seraient essentiellement les « plus riches », selon les chiffres de l’INSEE. Les personnes les « plus riches » habitent plus loin de leur lieu de travail et consomment donc plus de carburant. Cet argument est tiré d’une enquête nationale des transports et des déplacements réalisée par l’INSEE.

Tous les arguments avancés sont réels. Toutefois, cette analyse semble superficielle pour plusieurs raisons.

D’abord, parce qu’elle ne prend pas en compte le changement de mode de vie. Les dépenses contraintes ont augmenté. La structure du budget des ménages a évolué avec de nouvelles dépenses (téléphonie, internet, abonnement à des chaînes de télévision). Il faut aussi ajouter la médiatisation important du prix des carburants.

Ensuite, la notion des plus riches n’est pas expliquée. L’enquête classe les ménages en plusieurs catégories, en retenant comme critère leur revenu. Au total, il y a 9 catégories. L’avant dernière catégorie, avant d’atteindre celle où les revenus sont de 48.000 et plus, regroupe les ménages dont les revenus annuels sont compris dans l’intervalle de 36.000 à 48.000 euros. Un revenu de 36.000 € représente pour un couple qui travaille, environ 1.500 € de salaire mensuel. Avec 1.500 € un salarié fait-il parti des plus riches ? Le salaire médian s’élève à 1.800 € et le salaire moyen des français atteint quant à lui 2.2250 €.

Il convient d’ajouter que cette enquête porte sur des résultats de 1994 comparés à ceux de l’année 2008.

Ainsi, nous pouvons nous interroger sur qui se cache derrière « les plus riches ». Cette notion est difficile à définir. Selon l’INSEE ce sont les personnes dont les ressources se situent autour du revenu médian, soit entre 1.500 et 1800 €. La classe moyenne comprend 11.6 millions de français, soit une personne sur 6. D’autres définitions de la classe moyenne existent. En retenant une autre définition la classe moyenne peut représenter 2/3 des français.

Au-delà de 1.850 € de revenu,  selon l’INSEE, il s’agit de personnes « plutôt aisée ».

Les ménages de la classe moyenne paient le plus souvent l’impôt. Elles ne peuvent donc  bénéficier des aides réservées aux personnes non imposables. Un sentiment d’injustice apparaît. D’un côté, la classe moyenne reproche à l’Etat d’entretenir les plus « pauvres » grâce aux revenus de transfert. D’un autre, elle reproche au gouvernement de favoriser les plus riches avec la suppression de l’ISF, de souvent octroyer des cadeaux fiscaux aux grandes entreprises.

Certains s’étonnent de voir des propriétaires de véhicule de milieu ou haut de gamme arborer des gilets jaunes. Les opposants aux gilets jaunes considèrent comme illégitime la participation des personnes possédant un véhicule dont la valeur dépasse les 20.000 euros à ce mouvement. Cela semble démontrer uniquement le fait suivant. Les classes moyennes après avoir économisé ou emprunté pour acheter un véhicule se retrouvent à devoir payer plus cher le carburant et cette charge supplémentaire pèse lourdement dans leur budget. Les opposants aux gilets jaunes prétendent que ce ne sont pas les plus pauvres les plus pénalisés par l’augmentation du prix des carburants, mais les plus riches. Ils utilisent d’ailleurs l’étude précédente de l’INSEE pour justifier cet argument. Cependant nous pouvons aussi en tirer une autre conclusion. L’étude met en exergue que la distance entre le domicile et le lieu de travail est plus élevée pour les classes moyennes par rapport aux personnes les moins riches.

Le gouvernement a annoncé des mesures, face à la grogne des français, pour accompagner la transition écologique. Il veut accompagner les plus modestes. Toutefois, la grogne des français ne semble pas s’infléchir. Le Premier Ministre ne se serait-il pas trompé de cible ? La classe moyenne va-t-elle pouvoir bénéficier des mesures promises ? Celles-ci seront probablement soumises à des conditions de seuils de revenus et comme souvent la classe moyenne en sera exclue. Le sentiment d’injustice risque de perdurer. Les inégalités continueront à progresser entre les très riches et la classe moyenne. Le sentiment de peur des classes moyennes n’est-il pas justement de se retrouver parmi les plus modestes ?

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