Jody Horcholle

Le 25 juin 2018

La CEDH va bientôt rendre sa décision dans l’affaire Pavel VAVŘIČKA et autres c. République tchèque (n°47621/13). Cette obligation prévue par la loi pourrait être contraire au respect la liberté de conscience et des libertés familiales (art. 8 et 9 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales et de l’article 2 du premier Protocole additionnel).

De plus, elle pourrait également porter atteinte au principe d’un consentement libre et éclairé du patient prévu par les articles 2 et 5 de la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine de 1997 (Convention d’Oviedo).Un arrêt de la CEDH rendu en 2002 a précisé que la vaccination obligatoire était contraire à l’article 8 de la Convention Européenne des droits de l’Homme. (Arrêt SALVETTI c/Italie – CEDH Décision du 9 juillet 2002 ; n° 42197/98)

Pour y voir plus clair nous devons attendre la décision de la CEDH.

Mise à jour le 8 avril 2021

Saisie par des parents d’enfants refusés par des écoles maternelles faute d’avoir été vaccinés, en République Tchèque, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a rendu son avis jeudi 8 avril 2021 : dans son arrêt, elle estime que la vaccination obligatoire de ces enfants contre neuf maladies (diphtérie, tétanos, poliomyélite…), ne constitue pas une violation des dispositions de la Convention européenne des droits de l’Homme sur le « droit au respect de la vie privée ».

« La politique de vaccination poursuit les objectifs légitimes de protection de la santé ainsi que des droits d’autrui, en ce qu’elle protège à la fois ceux qui reçoivent les vaccins en question et ceux qui ne peuvent pas se faire vacciner pour des raisons médicales », souligne-t-elle, estimant que la vaccination obligatoire est « nécessaire dans une société démocratique. » La République tchèque « bénéficie donc d’une ample marge d’appréciation dans ce contexte », poursuit la Grande chambre de la cour.

Enfin, si « la non-admission des enfants requérants à l’école maternelle [a] impliqué pour eux la perte d’une occasion cruciale de développer leur personnalité », il « s’agissait d’une mesure préventive plutôt que punitive dont les effets ont été limités dans le temps », juge la CEDH.

Pour Nicolas Hervieu, juriste spécialiste de la CEDH, interrogé par l’AFP, « cet arrêt vient conforter la possibilité d’une obligation vaccinale sous conditions dans l’actuelle épidémie de Covid-19 ». Aussi, le juriste souligne « la marge d’appréciation laissée par la cour aux Etats dans leur politique de vaccination ».

Le juridique relève également que la décision de la CEDH fait « le constat d’un consensus général sur les effets bénéfiques de la vaccination qui ne sont pas remis en cause par les effets secondaires inévitables, dès lors qu’il y a un contrôle scientifique strict ».

Et la cour, selon lui, endosse « le principe de solidarité sociale qui peut justifier que l’on impose la vaccination à tous, même ceux qui se sentent moins menacés par la maladie, dès lors qu’il s’agit de protéger les personnes les plus vulnérables ».

Mise à jour le 29 juillet 2021

La la notion d’obligation n’implique pas une exécution forcée de la vaccination. L’article 3 de la CEDH l’exclurait. Les sanctions sont de nature administrative (éviction scolaire), plus rarement pénale, doivent rester proportionnées à l’objectif. Le consentement ne peut-être forcé mais incité.

Le Conseil d’Etat (CE, 6 mais 2019) dans deux décisions a jugé compatible l’obligation vaccinale avec la Convention de Rome et la convention pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine (Oviedo, 4 avril 1997). Pour le Conseil d’Etat « Il doit exister un rapport suffisamment favorable entre, d’une part, la contrainte et le risque présentés par la vaccination pour chaque personne vaccinée et, d’autre part, le bénéfice qui en est attendu tant pour cet individu que pour la collectivité dans son entier, y compris ceux de ses membres qui ne peuvent être vaccinés en raison d’une contre-indication » médicale, compte tenu à la fois de la gravité de la maladie, de son caractère plus ou moins contagieux, de l’efficacité du vaccin et des risques ou effets indésirables qu’il peut présenter ».

Les vaccins contre le COVID bénéficient d’une AMM conditionnelle. Ainsi, la question des risques ou effets indésirables peut probablement se poser pour ces vaccins. En effet, une AMM conditionnelle permet l’autorisation de médicaments qui répondent à un besoin médical non satisfait avant que des données à long terme sur l’efficacité et la sécurité ne soient disponibles. Cela est possible uniquement si les bénéfices de la disponibilité immédiate du médicament l’emportent sur le risque inhérent au fait que toutes les données ne sont pas encore disponibles. L’AMM conditionnelle rassemble tous les verrous de contrôles d’une autorisation de mise sur le marché standard pour garantir un niveau élevé de sécurité pour les patients.

Compte tenu du droit actuel, nous pouvons nous demander si celui -ci n’appelle pas à une possibilité d’exception, d’objection de conscience, pour respecter la liberté de conscience. Dans l’affaire Pavel VAVŘIČKA la Cour n’a pas exclu cette possibilité. Elle l’a toutefois écarté en espèce. En effet, il faut faire état de convictions fortes, établies et cohérente. En reprenant le raisonnement de l’arrêt Bayatyan (CEDH, 27 octobre 2009), « l’objection de conscience vaccinale » pourrait être retenue par la juridiction.

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