Jody Horcholle

A une époque pas si lointaine, dans les villages, le maire, l’instituteur et le curé inspiraient le respect et la confiance. L’enseignant jouissait de la considération témoignée par l’élève et ses parents. Quelques coups de règles pouvaient effleurer les doigts des enfants, les craies traversées une salle de classe pour rétablir l’ordre, et malgré cela l’enseignant conservait l’estime, des années plus tard, de ses anciens élèves. Un mot du maître suffisait à faire taire une assemblée. Aujourd’hui, un mot du professeur dans le carnet de liaison et le rectorat est immédiatement saisi, par les parents, pour contester cet acte, si infamant envers leur enfant ! Un adulte se permettrait de reprocher un comportement insolent pendant les cours à leur progéniture si bien élevé. Cela peut nous sembler surprenant. Avant, l’élève réprimander priait pour ne pas prendre une fessée par ses parents, si ces derniers venaient à l’apprendre. Aujourd’hui, l’enseignant prie pour ne pas voir les parents venir le menacer. Le législateur a décidé d’interdire la fessée. Il s‘agit d’une violence éducative dont les effets positifs restent improuvés. Il n’a pas tort. Nous avons tous constatés des incivilités de la part de jeunes enfants, avant que la fessée ne soit interdite. L’interdiction de cette pratique va encourager les parents à utiliser des méthodes plus efficaces. Il semble toutefois que les violences sur mineurs étaient déjà interdites. Les enfants prendront encore plus la confiance vis-à-vis de leurs parents en les menaçant de les dénoncer à la police

Le rôle du professeur a bien évolué. Sa mission consistait à transmettre le savoir. Aujourd’hui, il devient un animateur dont la tâche consiste à faire émerger les savoirs, les représentations des élèves. L’accès à la connaissance est facilité de nos jours, notamment grâce à l’Internet. Les savoirs sont disponibles et accessibles facilement en ligne, sur Wikipédia par exemple. D’ailleurs, les parents ne s’y trompent pas et considèrent de nos jours les professeurs comme des animateurs de centres aérés ou parfois prennent l’école pour une garderie. L’élève vient quand il veut. Les motifs pour justifier l’absence « la flemme ». Parfois, même les parents répondent au CPE (Conseiller Principal d’Education) qu’ils ne leur appartiennent pas de justifier les absences, car il s’agit de son travail.

L’école devient un supermarché du savoir, avec des enfants devenus des consommateurs d’une prestation de service. Il s’agit d’un service gratuit. Les absences seraient-elles aussi fréquentes si les parents devaient payer ? L’enfant vient au grès de ses désirs. L’enseignant doit s’adapter. Il ne peut rien dire puisque souvent des certificats viennent attester les absences. Il n’est plus rare d’ailleurs de voir des enfants atteints d’une phobie scolaire.

La bienveillance revient en boucle dans les discours des chefs d’établissements, des inspecteurs et même du ministre. Les enseignants doivent être bienveillants. Il convient de privilégier le dialogue, de discuter avec les familles. L’écoute, l’empathie, la bienveillance représentent des qualités indispensables pour exercer ce métier. La discussion pour trouver des solutions pour préserver les intérêts des élèves est indispensable. La façon dont a été gérée la crise de fin d’année témoigne à quel point ses valeurs paraissent indispensables au sein de l’Éducation Nationale. Il semble que le ministre a perdu la confiance d’une partie de ses enseignants.

Une partie de l’opinion publique, favorable aux décisions prises par le ministre, témoigne de leur soutien à ce dernier sur les réseaux sociaux en parlant de prise d’otage. D’autres propos, dont je ne me ferai pas l’écho car relevant du vulgaire, montrent à quels points les utilisateurs des réseaux sociaux peuvent caricaturer les professeurs grévistes. Pour certains, les enseignants grévistes, conte la réforme, sont adhérents à un syndicat ou à un parti politique gauchiste.

Les enseignants ne sont pas élus démocratiquement et peuvent faire la grève au mois de mars. Ce type de commentaire prête à faire sourire. Nous pouvons aussi lire les commentaires des soutiens du ministre réclamés des sanctions contre les grévistes. Il parait indispensable de rappeler que le droit de grève est un droit constitutionnel. Les grévistes ne vont pas choisir le mois pour réaliser leurs actions en fonction du souhait du porte-parole du gouvernement. Un manque de bienveillance vis-à-vis des enseignants grévistes.

Les enfants scolarisés en parcourant les réseaux sociaux aperçoivent les insultes, des adultes, envers les enseignants grévistes. Ces jeunes lecteurs risquent se de faire une représentation assez négative de leurs enseignants. Comment leur demander de respecter ces derniers ? D’ailleurs, vu le nombre de critiques à l’égard de cette profession, les jeunes étudiants préféreront sans doute se tourner vers un autre métier. L’Éducation Nationale peine à recruter. Les traitements si peu attractifs, les conditions de travail parfois difficiles, peuvent expliquer le peu d’entrain pour venir passer un des concours proposés par l’Éducation Nationale.

Ceux si enclin à venir lapider les enseignants sur la place publique, se plaindront demain de l’absence du professeur de leurs enfants. Le professeur absent ne sera pas remplacé faute de candidat. Les critiquent fusent sur l’Éducation Nationale. Il faut réformer. Les enseignants sont contre toutes les réformes. Le niveau des élèves baisse. La France se voit perdre des places dans les classements comparant les systèmes éducatifs au niveau mondial. Est-ce la faute des enseignants ? D’abord, perdraient-ils moins de temps en cours si les parents remplissaient leurs principales missions, à savoir l’éducation de leurs enfants ? Ensuite, comment évaluer une réforme si à chaque changement de ministre, celui-ci veut laisser son empreinte et en lance une nouvelle sans avoir pris le temps d’évaluer celle de son prédécesseur ? Les enseignants mettent en œuvre les programmes décidés par le ministère. Ils appliquent les consignes venues du ministre. Il est évident que tout se réalise dans la concertation et sans aucune verticalité avec pour seul objectif la réussite des élèves.

L’école de la confiance…

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